Jeu publicitaire – annonce de gain

L’organisateur d’un jeu publicitaire qui annonce un gain à personne dénommée sans mettre en évidence à première lecture l’existence d’un aléa s’oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer.

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 Cour de cassation chambre civile 1 Audience publique du mercredi 10 juillet 2013 N° de pourvoi: 12-20849

Sur le moyen unique :

Vu l’article 1371 du code civil ;

Attendu que l’organisateur d’un jeu publicitaire qui annonce un gain à personne dénommée sans mettre en évidence à première lecture l’existence d’un aléa s’oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que faisant valoir qu’elle avait reçu de la société Agence de marketing appliqué différents documents lui annonçant qu’elle avait gagné des sommes d’argent, mais n’avait pu obtenir la délivrance de ses gains, Mme X… a fait assigner cette société en paiement de ces sommes ;

Attendu que pour rejeter ses demandes, l’arrêt énonce que si les documents publicitaires adressés à Mme X…, destinés à l’inciter à passer commande, entretiennent volontairement une ambiguïté de par les termes employés, leur formulation, leur emplacement, pouvant laisser croire, au vu d’une lecture incomplète, que la destinataire était effectivement gagnante des gains annoncés, il est toutefois mentionné le règlement du jeu qui indique clairement l’aléa par un nouveau tirage au sort, que la nécessité de prendre connaissance du règlement est mise en évidence par la mention en gras et lettres capitales « A lire attentivement – règlement officiel et complet du jeu », que la présentation du règlement s’avère suffisamment lisible, même si elle demande une certaine attention qui peut légitimement être exigée de la part du bénéficiaire potentiel au regard des enjeux financiers, que ce procédé commercial largement répandu est en outre connu du grand public et ne peut sérieusement abuser une personne de cet âge, née en 1954, recevant à plusieurs reprises en quelques mois des annonces de gains différents ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que l’annonce des gains ne mettait pas en évidence, à première lecture, l’existence d’un aléa, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il écarte la demande de sursis à statuer, l’arrêt rendu le 12 octobre 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Riom ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Limoges ;

Condamne la société Agence de marketing appliqué aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Agence de marketing appliqué à payer à Me Copper-Royer la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour Mme X…

Madame X… fait grief à l’arrêt attaqué de l’AVOIR déboutée de l’intégralité de ses demandes en paiement.

AUX MOTIFS QUE: «(¿) l’organisateur d’une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l’existence d’un aléa s’oblige, par ce fait purement volontaire à le délivrer en application de l’article 1371 du code civil ; Qu’il doit toutefois être établi la croyance légitime du destinataire quasi-contractant en la réalité de ce gain ;

«(¿qu’) en l’espèce (¿) dans les différents documents publicitaires adressés à Mme X… et destinés à l’inciter à passer commandes, il est volontairement entretenu une ambiguïté de par les termes employés, leur formulation, leur emplacement, pouvant laisser croire au vu d’une lecture incomplète que la destinatrice était effectivement gagnante des gains annoncés; Qu’il est toutefois également mentionné dans ces documents le règlement du jeu qui indique clairement l’aléa par un nouveau tirage au sort et la différence entre les prix principaux et les prix annexes ; Que la nécessité de prendre connaissance desdits règlements est mise en évidence dans les trois jeux par la mention en gras et lettres capitales « A lire attentivement – règlement officiel et complet du jeu »; Qu’en outre la présentation des règlements des jeux s’avère suffisamment lisible dans les trois documents publicitaires, même si elle demande une certaine attention qui peut légitimement être exigée de la part du bénéficiaire potentiel au regard des enjeux financiers ; Que Mme X… a également reconnu au moins pour deux des trois jeux (22.500 ¿, 25.500 ¿) avoir pris connaissance du règlement complet du jeu et de ses aléas et les accepter ; Qu’il n’est pas exclu qu’elle ait fait de même pour le jeu de 31.000 ¿, n’ ayant pas versé aux débats la documentation complète dudit jeu qui comportait également un récépissé de convocation comportant cette mention, tel que cela résulte du spécimen type de la société AMA ;

Que ce procédé commercial largement répandu est en outre connu du grand public et ne peut sérieusement abuser une personne de cet âge, née en 1954, recevant à plusieurs reprises en quelques mois des annonces de gains différents ; Qu’ainsi, l’existence d’une croyance légitime par le destinataire de la réalité du gain n’est pas établie ;

Que les observations de Mme X… sur le non respect de l’article L. 121-36 du code de la consommation, qui est passible d’une amende, ne présentent par d’intérêt pour l’examen d’une action engagée sur le fondement du quasi-contrat ayant uniquement pour objet la demande de délivrance de l’annonce d’un gain » (arrêt attaqué p. 2, deux derniers § et p. 3, § 1 à 3) ;

ALORS, D’UNE PART, QUE l’organisateur d’une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence, à première lecture, l’existence d’un aléa, s’oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer ; qu’il ressortait des propres constatations de l’arrêt attaqué que « (¿) dans les différents documents publicitaires adressés à Mme X… et destinés à l’inviter à passer commandes, il est volontairement entretenu une ambiguïté de par les termes employés, leur formulation, leur emplacement, pouvant laisser croire (¿) que la destinatrice était effectivement gagnante des gains annoncés » (arrêt attaqué p. 2, dernier § et p. 3, § 1er) ; qu’en considérant cependant que n’était pas établie la croyance légitime de Mme X… en la réalité du gain sans avoir recherché si la différence de présentation entre les gains annoncés, au moyen de caractères d’une fonte plus importante, parfois soulignés ou même mis en valeur par l’utilisation de couleurs différentes et la reproduction au verso du règlement du jeu, en un paragraphe compact, au moyen d’une police de caractère fine était de nature à mettre en évidence, à première lecture, l’existence d’un aléa, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 1371 du code civil, de celles des articles L. 121-36 et suivants et L. 133-2 du code de la consommation ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE l’organisateur d’une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence, à première lecture, l’existence d’un aléa, s’oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer; que pour considérer que n’était pas établie la croyance légitime de Mme X… en la réalité du gain, la cour d’appel a relevé que : «(¿) la présentation des règlements des jeux (¿) demande une certaine attention qui peut légitimement être exigée de la part du bénéficiaire potentiel au regard des enjeux financiers» (arrêt attaqué p. 3, § 1er) ; qu’en retenant dès lors l’existence d’un aléa motifs pris de ce que les enjeux financiers supposaient une attention particulière du bénéficiaire potentiel, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article 1371 du code civil et de celles des articles L. 121-36 et suivants et L. 133-2 du code de la consommation ;

ALORS, ENFIN, QUE le juge ne saurait, au lieu de se reposer sur la constatation d’un fait réel et certain, fonder sa décision sur une simple hypothèse; qu’en considérant dès lors que n’était pas établie la croyance légitime de Madame X… en la réalité du gain motifs pris de ce qu’«il n’est pas exclu qu’elle ait (¿pris connaissance du règlement) pour le jeu de 31 000 ¿» (arrêt attaqué p. 3, § 1er), la cour d’appel a statué par un motif hypothétique et privé sa décision de motifs en méconnaissance des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

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